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À propos de l’oratorio « L’Europe de mes rêves »

Dossier “Ils réparent la France

Journal La Croix du vendredi 12 mai 2017

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Un rêveur actif

Le compositeur envisage la musique comme un art de la relation, du dialogue entre ceux qui s’ignorent, voire s’opposent. Son nouveau projet prend les couleurs d’une Europe rêvée …

Dans l’univers de la création musicale, Thierry Machuel est un artiste estimé et reconnu. Plusieurs de ses œuvres n’ont-elles pas figuré au programme de l’option musique du bac ? Mais le talent du compositeur se double de l’engagement d’une personnalité généreuse qui inscrit son inspiration dans le tissu social et la vie des hommes. Même la plus complexe, voire la plus déchirée. Ainsi, sa Trilogie de la détention, créée au Collège des Bernardins à Paris l’an dernier, regroupait trois oratorios sur des paroles de détenus, de mères de détenus et de victimes. “Je garderai à jamais en mémoire les mots de cette maman d’un enfant assassiné qui avait voulu rencontrer des personnes incarcérées pour des crimes analogues à celui qui avait brisé sa vie. Un travail de « justice réparatrice” saisissant…”, évoque Thierry Machuel.

Aujourd’hui, le compositeur, – en collaboration avec Marie Baudart, Mathias Charton et François Virot – entend apporter sa petite pierre à la réconciliation des esprits autour de l’idée européenne. Du 25 au 27 mai 2017, à Yvetot en Normandie, des centaines d’enfants d’ici et d’ailleurs chanteront ensemble l’Europe de leurs rêves. Dix classes de collégiens du rectorat de Rouen et neuf chœurs de jeunes venus d’Allemagne, d’Estonie, d’Espagne ou de Pologne vont conjuguer leurs énergies sur scène, se réjouit Thierry Machuel. Des poèmes écrits par des enfants (certains sont de petits joyaux!) et traduits dans toutes les langues composent la trame d’un spectacle musical, pour découvrir le monde à travers la poésie du monde…

Issus pour certains de quartiers sensibles ou de territoires isolés, ces collégiens normands “n’auront peut-être jamais l’occasion de découvrir les pays dont ils vont chanter les mots, poursuit Thierry Machuel. Mais ils se sont précipités dans l’aventure avec ferveur. D’autant qu’ils vont accueillir chez eux leurs camarades étrangers”. Persuadé qu’il faut imaginer sans cesse des manières pour “dialoguer envers et contre tout, surtout là où le vote FN a beaucoup pesé”, le musicien s’interroge cependant sur l’implication des parents dans cette utopie sans frontières : “il y a toute une génération qui n’a pas connu la guerre, qui souffre au quotidien du chômage, du déclassement, et qui attribue ces difficultés à l’Europe”.

C’est pourquoi le spectacle se terminera sur un petit dialogue au sujet de l’avènement d’une société réconciliée :

– tu crois que ça arrivera ?
– je ne sais pas
– j’ai peur
– je sais, moi aussi, mais on peut toujours se battre contre la peur !