Trois cantates profanes pour soprano, récitant et ensemble instrumental
Les poèmes que j’ai choisis pour ces trois cantates sont issus de nombreux recueils et ne se suivaient pas à l’origine. Au-delà du thème de la Nature, essentiel dans l’œuvre de Guillevic – avec une manière inimitable de s’identifier aux fleurs, aux rocs, ou encore au merle ou au papillon – il y a un récit, que je m’efforce de tisser entre les poèmes, discrètement : Voir est un Livre d’Heures qui incite à regarder la vie autrement, sur une durée qui va du lever du jour à la tombée de la nuit ; Ensemble est une rencontre amoureuse, vécue comme un engagement, une promesse faite non seulement l’un envers l’autre, mais aussi côte à côte, face à la communauté humaine et dans l’espérance d’un monde meilleur ; cet engagement, exprimé à travers les textes que Guillevic écrivit durant les années de guerre et son activité de résistant, trouve un aboutissement dans Maintenant, dialogue quasi mystique entre la soprano et l’ensemble instrumental, durant lequel nous est dévoilée peu à peu comme pour une initiation toute la sagesse de l’auteur.
Dans l’écriture du chant, je me rapproche toujours de la parole, hauteurs et courbes naturelles, lyrisme contenu, dans un souci de clarté même si parfois la complexité formelle l’emporte brièvement, comme dans la superposition d’un texte parlé avec un autre chanté. L’écriture instrumentale est très dépouillée ; elle évolue en cours de route, mais le climat de la dernière partie de Maintenant – sur la contemplation de l’instant – retrouve une tranquille atonalité. Sans doute aussi, certains passages rappellent-ils quelque chose de la « chanson réaliste » des années Brecht-Weill, mais je ne m’y attarde pas, tout comme reste une exception la modification apportée au poème « Il y avait de la lumière … » ou le moi est remplacé par un nous, par souci de cohérence musicale. Mots que portent les lignes, harmonies de l’intériorité poétique et du mystère, imperceptibles polyrythmies, couleurs des timbres purs, pour transmettre tout ce que je ressens de vibrations chez Guillevic.
Novembre 2012
Brigitte Peyré, soprano , Julien Müller, récitant, ensemble instrumental dirigé par Benoît Fromanger
Enregistrement réalisé grâce au soutien de la ville de Belley et de l’association Guitares en Vignes.
CD « Voir, Ensemble, Maintenant » septembre 2012, Label Inconnu LI 12-0301, distribution Codæx
(Voir figure également sur le CD « Echos d’artistes », Lyrinx Lyr 2250, dans l’interprétation de l’ensemble Télémaque sous la direction de Raoul Lay)